« Si on veut tuer le petit commerce, dégoûter les jeunes
de cette profession et vider les centres villes.
C'est la meilleure façon de s'y prendre, s'insurge Philippe Daquai,
détaillant en chaussure, complètement « hostile » à
cette mesure, « qui profiterait beaucoup plus aux grandes
chaînes et grandes enseignes ».
« Les gens ont besoin de se reposer le dimanche, de profiter
de leur vie de famille.
C'est un fait de société, insiste le chausseur avec vigueur, et
c'est encore plus vrai dans un secteur où 80 % des temps
partiels sont des femmes ».« Le magasin est actuellement
ouvert au public du lundi midi au samedi soir, soit plus de 45 heures
par semaine, indique Philippe Daquai, le lundi matin est souvent
consacré aux achats, soit 3 heures supplémentaires, et nous
avons régulièrement des salons professionnels qui nous prennent
entre deux et huit dimanches par an, selon les professions et
il faudrait en plus travailler dix dimanches en plus », énumère-t-il
écouré par ces potentielles réformes.
Un écho qui se fait largement entendre aussi dans les rangs des
employés : « même si ces journées sont payées double ».
Au-delà des questions sociales, les commerçants soissonnais s'accordent
à dire « que l'assouplissement ne servirait à rien sur le
plan économique ». « Cette proposition est complètement
aberrante.
« Un pouvoir d'achat pas extensible »
Cela ne fait que modifier la répartition des achats dans les jours
de la semaine, sans engendrer de chiffre d'affaire supplémentaire,
confie Catherine Neauleau, présidente de l'association des vitrines
du Soissonnais, car s'il y a peu de consommation, c'est qu'il
n'y a pas assez de pouvoir d'achat ».
D'expérience, les commerçants ont remarqué « que les clients
du dimanche étaient plus des promeneurs que de vrais acheteurs ».
M. Fritz, secrétaire général de la fédération des organisations
commerciales pour le Nord-Pas-de-Calais, enfonce le clou :
« personne ne pourra démontrer que la faiblesse de consommation
dans notre pays est principalement indexée au fait que les magasins
soient trop souvent fermés le dimanche ». A ce sujet, il
rappelle « que deux villes - Flers-en-Escrebieux (Nord) et
Noyelles-Godault (Pas-de-Calais) ont été condamnées pour avoir
donner des autorisations d'ouverture non conforme à la législation
en vigueur. D'autres procédures sont en cours ».
Réaction en chaîne
Ouvrir régulièrement le dimanche imposerait également à beaucoup
d'autres professions de suivre le mouvement : « nous
aurons des lettres, des paquets à envoyer, des renseignements
à demander aux diverses administrations [.] nous aurons besoin
des banques pour déposer les fonds, car nos assurances ne nous
autorisent pas à garder nos recettes chez nous. Les magasins devront
être achalandés, donc les entreprises de livraisons devront gérer
le 7 jours non-stop. Comment feront-elles avec l'interdiction
de rouler le dimanche. », énumère inlassablement Philippe
Daquai et d'ajouter « on veut nous faire croire que les ouvertures
du dimanche seraient un progrès, mais si tout le monde travail
le dimanche qui viendra faire ses courses ce jour-là ? ».
A.A.
Actuellement, la loi de 1993 permet aux commerces d'ouvrir cinq
dimanches par an, même s'il existe de nombreuses autres dérogations,
notamment pour les commerces en zone touristique.